P. Marie-Magdelaine présente Caribbean Cool Jazz

Le guitariste guyanais Patrick Marie-Magdelaine sort le premier album sous son nom, Caribbean Cool Jazz. Après avoir joué dans des registres aussi variés que les univers de Teri Moïse ou Papa Wemba parmi d’autres, il se tourne vers le jazz créole accompagné d’amis musiciens de renom comme les camerounais Guy Nsangué et Valéry Lobé, ou bien encore le percussionniste Arnold Moueza et la pianiste Tom McClung.


Patrick Marie-Magdelaine : « Caribbean Cool Jazz »


Année : 2006
Label / Référence :
Personnel : Patrick Marie-Magdelaine (g), Tom McCLung (pno & rhodes), Guy Nsangué (b), Arnold Moueza (perc), Valery Lobé (dms)
Titres
1- Colombo A Kaw - 06:49 / 2- Dragonfly Samba - 06:37 / 3- Alizés Calypso - 05:19 / 4- Guyana - 06:55 / 5- Forest Dance (For 2) - 03:09 / 6- To Be Hip... - 06:35 / 7- Esquisitos - 06:29 / 8- Mr. Walker - 05:07

Le Bananier Bleu : Peux-tu nous rappeler ton parcours musical particulièrement riche ?

Patrick Marie-Magdelaine : J’ai commencé ma carrière professionnelle à 17 ans en écumant la région de Reims avec les orchestres de danse, puis les petits combos de jazz. Je suis ensuite allé étudier au Centre d’Information Musicale (CIM) à Paris. Cette ville est vraiment un lieu de rencontre pour les musiciens. A Paris j’ai intégré diverses formations qui jouaient des styles variés, de la chanson au jazz, de la fusion… On se produisait dans des soirées, dans les clubs et les festivals comme Jazz à Vienne ou le JVC jazz festival de Nice.

C’est à cette époque que j’ai rencontré le bassiste camerounais Noël Ekwabi qui m’a proposé d’auditionner pour une tournée japonaise avec le chanteur congolais Papa Wemba. Il s’en est suivi douze années de voyage et de rencontres avec cet artiste considéré comme l’une des plus belles voix de l’Afrique.

Avec Papa Wemba, j’ai connu l’aventure des premières parties de Peter Gabriel en 1994 aux Etats-Unis et en Europe, le concert de passation de pouvoir entre Nelson Mandela et Thabo Mbeki en Afrique du Sud, un grand moment… J’ai accompagné aussi Geoffrey Oryema de l’Ouganda, Coco Mbassi du Cameroun, King Mensah et Afia Mala du Togo, la chanteuse saxophoniste suédoise Sofi Hellborg dont le répertoire s’inscrit fortement dans les styles afro-beat et drum&bass. Je me suis intéressé au Son cubain ce qui m’a donné l’occasion de jouer le très, cette petite guitare à la sonorité très typée qui remplace le piano dans les groupes de Son. J’adore chanter les chœurs et jouer le très dans ce répertoire. J’ai aussi joué la musique traditionnelle de la plaine colombienne et de la salsa comme bassiste.

Ma dernière rencontre c’est Manu Dibango, nous nous sommes croisés plusieurs fois lors de la promotion de mon album dans les studios d’Africa N°1 avec Robert Brazza et pour son émission du dimanche. Nous avons alors jammé dans les studios de Radio Nova. Le feeling est si bien passé que je me suis retrouvé sur scène pour quelques concerts avec son orchestre le mois dernier et on remet ça. Nous serons au Casino de Paris le 20 mars ! J’y ai retrouvé mon ami Noël Ekwabi qui se trouve être son chef d’orchestre depuis dix ans.

Parallèlement à ces aventures musicales j’ai toujours gardé le contact avec le jazz plutôt latin avec mon ami Laurent Erdös fondateur du big band Mambomania. Nous expérimentions un quartet basé sur des compositions du vibraphoniste Cal Tjader, de Dizzie Gillespie, Poncho Sanchez, nous jouions des cha cha, mambos, boogaloos etc… Ce quartet était composé de Manu Bizeau aux congas, Joël Dobat contrebasse, Laurent Erdös vibraphone et moi même à la guitare. Le mariage de ces deux instruments produit un son vraiment magique.

LBB : Pourquoi avoir attendu si longtemps avant de présenter ton premier album sous ton nom ?

PMM : Mieux vaut tard que jamais ! Ce n’est pas si évident d’engager une carrière solo, il y a beaucoup de musiciens, beaucoup de propositions, il faut se sentir prêt et se lancer sans trop “cogiter”. En plus, le parcours éclectique est comme un piège, on se retrouve constamment dans l’apprentissage de nouvelles connaissances, on est sur plusieurs terrains à la fois ; on est riche d’expériences et d’émotions musicales tellement diverses qu’on peut avoir l’impression de se perdre. Il faut du temps pour vivre, mûrir toutes ces diversités musicales et se retrouver. Après tout, à chacun son rythme ! Le principal c’est bien d’avoir commencé !

L’idée a germé après une série de concerts parisiens au Petit Opportun et aux 7 Lézards dans le Quartet Créole de Joêl Dobat contrebassiste, avec au piano Alain Jean-Marie, aux percussions Arnold Moueza et moi même à la guitare, j’ai eu envie de continuer l’expérience en jouant des compositions originales. J’ai pensé qu’il était temps en 2006 d’enregistrer mon premier album. D’ouvrir cette bonne bouteille qui attend d’être dégustée depuis tant d’années. Un nectar complexe qui ne demandait qu’à être apprécié de tous sans modération. Ce qui est paradoxal c’est que tout s’est passé rapidement à partir du jour ou j’ai décidé d’enregistrer cet album ; seulement trois jours de prises !

P1010083LBB : L’album s’appelle « Caribbean Cool Jazz », il se démarque plutôt de ce que tu as fait jusque-là. C’était enfin l’occasion de présenter la musique qui te tient à cœur ?

PMM : Absolument ! Ma vie de musicien est essentiellement constituée par l’accompagnement de chanteuses, chanteurs, alors que mes premières amours vont vers le jazz, la musique improvisée avec la notion de liberté, chacun s’exprimant à sa manière selon sa vraie personnalité.

Attention je ne dénigre pas la voix ni les chanteurs. J’aime chanter, j’adore la voix qui est le premier instrument, l’action de chanter est très jouissive et j’aime accompagner. Je n’oublie pas non plus que les standards de jazz sont souvent des chansons !

LBB : L’appellation “cool jazz” n’est pas innocente. Pourquoi cette appellation ?

PMM : En effet le cool jazz est un courant musical qui commence vers la fin des années 40 avec notamment Miles Davis et son Birth of cool. Après le be-bop et ses tempi très rapides, le cool jazz ralentit la vitesse d’exécution et travaille sur le son, la détente et une certaine sobriété aérée.

Le cool jazz a remporté un vif succès sur la côte ouest des Etats-Unis auprès de musiciens comme Chet Baker, Stan Getz, Dexter Gordon, Art Pepper, pour donner naissance au West Coast Jazz. Cette rafraîchissante cool attitude correspond tout à fait naturellement à ma personnalité et à ce que je voulais exprimer dans ce premier album.

LBB : On retrouve beaucoup d’influences dans ta musique, latin, caraïbe, africaine mais bien sûr jazz, et difficile de ne pas penser à Wes Montgomery en écoutant le disque…

PMM : Le Jazz est bien évidemment le dénominateur commun à toutes ces influences africaines et caraïbes qui me tiennent à cœur. Wes Montgomery est toujours la référence pour beaucoup de guitaristes et de plus, toutes ses sessions avec le regretté Ray Barreto aux congas ont toujours été inspirantes et stimulantes à mes oreilles. C’est déjà du jazz latin. J’apprécie aussi d’autres guitaristes comme Jim Hall pour sa notion de l’espace temps et sa sensibilité, Pat Martino et bien d’autres.

LBB : Tu as réuni une équipe très métissée, de l’Afrique à l’Amérique en passant par la Caraïbe. Parle-nous de tes musiciens.

PMM : Cette équipe s’est constituée tout naturellement, j’ai appelé mes amis et ils ont répondu présent sans hésitation. Je travaille avec le guadeloupéen Arnold Moueza depuis pas mal d’années. C’est un excellent percussionniste qui connaît bien les rythmes des caraïbes. Il a travaillé entre autres avec le pianiste cubain Alfredo Rodriguez.

Valery Lobé vient du Cameroun, je l’ai rencontré lors d’une séance vers 1991, je me souviens que Thierry Vaton était aussi présent à cet enregistrement. Par la suite j’ai retrouvé Valery en 1995 dans le Molokaï de Papa Wemba, (à cette époque il me disait que j’aurais déjà dû enregistrer un ou deux albums). Valery Lobe est un batteur qui possède une assise remarquable ainsi qu’une connaissance des rythmes sans pareil. Il a une grande expérience musicale, Salif Keita, Manu Dibango, Papa Wemba, Don Cherry, Sam Mangwana, Ultramarine etc.

Quant au bassiste, on ne présente plus Guy Nsangué illustre représentant de l’école de basse camerounaise. Son CV est éloquent, Kassav, Jean-Luc Ponty etc… Il a rejoint le Molokaï de Papa Wemba en 1998 et nous avons eu l’occasion de donner beaucoup de concerts ensemble.

Enfin au piano Tom Mc Clung de New York que j’ai rencontré plus récemment par Arnold. Ils accompagnaient alors le rappeur dominicain Mangu. Lorsque j’ai entendu jouer Tom j’étais tout de suite persuadé d’avoir trouvé le pianiste idéal pour mon projet. Nous avons assuré quelques gigs en duo dans un répertoire de standards avec beaucoup de plaisir. L’aventure pouvait alors commencer ! Tom est américain : il a la culture du jazz. Il accompagne entre autres Archie Shepp, et il a l’expérience des musiques caribéennes. Il est très ouvert. J’aime beaucoup son expressivité et sa générosité. J’aime jouer avec lui.

J’ai réuni là une équipe de choix, ces musiciens sont talentueux et j’ai eu beaucoup de chance d’avoir pu les réunir pour ce premier album.

LBB : Des projets de tournée en cours ? Quel est l’avenir du Caribbean Cool Jazz de Panama ?

PMM : J’espère une longue vie au Caribbean Cool Jazz et nous y travaillons dans la bonne humeur en restant cool. J’ai un concert programmé pour la Foire de Paris le samedi 28 avril, à 18h. Nous travaillons aussi pour monter une tournée dans la Caraïbe : je reçois des propositions de concerts pour ce printemps en Guyane, en Guadeloupe et à la Martinique. J’espère le festival de Cayenne à l’automne.

Des festivals en France, sur l’ile de Ré, en Charente-Maritime et en Belgique sont en prévision. J’espère bientôt enregistrer le prochain album et je souhaite développer un projet avec les musiciens du fleuve dans le Grand Ouest guyanais. Pour suivre mon actualité, il faut se connecter sur myspace.com/patrickmariemagdelaine et sur le Bananier Bleu !

Propos recueillis
par Christophe Jenny – février 2007

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