Et le dimanche soir, c’est aussi concert. C’est plus rare, mais en l’espèce c’était assez exceptionnel. Au Café de la Danse se déroulait le dernier concert de la tournée actuelle du collectif Black Lives – From Generation To Generation. Nous avons déjà eu l’occasion d’en parler au moment de la sortie de l’album, paru en début d’année. Et c’est le programme qui nous était proposé dimanche. Je salue d’abord le véritable tour de force réalisé depuis le départ par Stefany Calembert-Washington qui porte à bout de bras la réalisation et la réussite – car incontestablement, c’en est une – de cette aventure. Jugez plutôt : quinze musiciens originaires d’un peu partout dans le monde, venus des États-Unis, des Antilles, de France, dans la conjoncture morose actuelle, rassemblés et programmés sur plus d’une dizaine de dates entre la Belgique et la France. Inespéré !
Pour ce concert, la mise en bouche fut déjà formidable. Le guitariste virtuose sénégalais Herve Samb a réuni un quartet qu’il n’avait plus fait tourner depuis plusieurs années, formé ici avec Olivier Témime (sax), Reggie Washington (b) et Sonny Troupé (dms), pour ressusciter un répertoire tout en énergie. Les quatre ont muri, et les nouveaux arrangements, entre funk, Afrique et déchainements rock sont irrésistibles. Ajoutons qu’il est clair qu’ils s’amusent sur scène autant que nous dans la fosse. Un vrai bonheur !
Rien de mieux donc pour préparer la fusion incandescente qui suivait, entre jazz funk, soul, rap et groove, par quelques-uns des meilleurs interprètes du moment. Si le projet prend bien évidemment ses racines dans le mouvement Black Lives, il propose beaucoup plus globalement un message de fraternité, de partage et s’appuie sur des compositeurs et des arrangeurs qui y ont mis toute leur ferveur – et je vous renvoie à l’article paru sur le site en début d’année.
Sur le devant de la scène Sharrif Simmons, soutenu par la guitare de David Gilmore et les platines de DJ Grazzhoppa, le scande d’entrée, « We are here » ! Le chant est partagé avec Christie Dashiell et Tutu Poane, qui nous gratifieront en fin de set d’une sublime version duo de From the Outside, soutenues par les claviers de Federico Peña. Au saxophone ténor, Jacques Schwarz-Bart, associé au nouveau venu Pierrick Pédron – à l’alto – pousse au groove avec des effluves qui rappellent parfois le RH Factor. Autre ancien du RH, Reggie Washington, au milieu de la scène, est la véritable tour de contrôle de ce big band moderne à géométrie variable. Il peut s’appuyer sur les batteries de Gene Lake et Inna Most (rien que ça) ainsi que sur un Sonny Troupé survolté, à la batterie et au ka (quelle version de Sa Nou Yé !!), et qui en fin de concert, tiendra même tête à lui seul aux deux autres !
Difficile de n’oublier personne tant ils sont tous remarquables. Grégory Privat alterne comme à son habitude piano et claviers distordus, toujours avec justesse et une technique de précision. Jean-Paul Bourelly, aux allures de gentil géant déjanté, triture sa guitare de manière ahurissante pour en faire jaillir des fulgurances hendrixiennes, quand Adam Falcon, à l’acoustique et au chant, séduit la salle, entre blues et funk. Enfin, on a aperçu furtivement dans le public, Cheick Tidiane Seck, venu écouter ses camarades, mais nous l’aurons sur scène une prochaine fois.
Tout est fait pour que l’aventure Black Lives – From Generation to Generation continue, et nous ne pouvons que nous en réjouir. Le contenu d’un deuxième album vient d’être enregistré, et des dates sont déjà prévues en 2024. Ma seule recommandation ? Restez à l’affût !!