Bruno Jofa – violon
Biographie
“Je suis né le 22 janvier 1964 de parents plasticiens, en peine campagne lorraine. Ça n’était pas une famille de musiciens, mais il y avait du rythme, des couleurs, des matières. La musique était là, comme sous-jacente. Très tôt, elle m’apportait mes premières émotions : les fanfares bretonnes, le son cristallin des cordes andines, le souffle rauque des flûtes en roseau, les tambours de l’Afrique… Mon univers musical s’est vite construit autour du « tourne-disques » de la maison où j’avais appris à faire tourner à longueur de journée mon petit monde à moi. Je m’amusais alors à reproduire avec la bouche toutes les sonorités d’instruments, à la maison, dans la voiture, n’importe où…
En grandissant, le besoin de toucher la musique avec les mains s’est fait de plus en plus grand. Ma première vraie rencontre a eu lieu vers neuf ans : une guitare de jazz style manouche avec une caisse échancrée et un cordier en métal. Mon père me l’a mise dans les mains et m’a montré quelques-uns des accords avec lesquels il s’accompagnait sur des chansons de Brassens ou de Jacques Douai. Depuis ce jour, j’ai toujours eu un instrument dans les mains.
Mon apprentissage ne s’est jamais focalisé sur un aspect unique de la musique. J’ai d’abord chanté avec ma guitare, les chansons de Graeme Allwright ou de Le Forestier. Parallèlement, je travaillais avec acharnement des morceaux de bravoure (mais très jolis) de Steve Waring ou de Pierre Bensusan, par exemple. Ils avaient une technique et un son qui me plaisaient. Les musiques folkloriques m’attiraient aussi beaucoup, aussi bien la musique des gitans de Transylvanie que celle des écossais ou même des cajuns. J’y trouvais des sonorités exotiques qui me transportaient, bien loin des variétés de la télévision et des copains d’école.
Féru de bois et de construction depuis mon plus jeune âge, j’ai vite marié cette passion à celle de la confection même des instruments. J’ai fabriqué des dulcimers, rafistolé des mandolines ou des harpes. J’avais 15 ou 16 ans quand j’ai dû fabriquer mon premier banjo faute d’autres moyens… Je l’ai encore. Il y a toujours eu ce rapport un peu charnel avec l’instrument, cette fascination de la vibration, de l’acoustique naturelle, un peu comme un dompteur pour ses bêtes. La musique n’a jamais été pour moi une affaire de technique mais une simple et profonde passion. D’abord solitaire –je suis un parfait autodidacte–, elle est vite devenue le lieu de mes plus belles rencontres, m’offrant la compagnie des musiciens que j’écoutais et avec qui je finissais par jouer des heures durant à longueur de vinyl.
A 15 ans, un ami à mon père, sculpteur lui aussi, m’a donné un vieux violon qu’il avait dans son grenier. Je me souviens avoir fabriqué mon premier archet pour jouer. Pendant plusieurs années, j’ai appris des morceaux irlandais, bretons ou écossais, du tango argentin, du tzigane, du bluegrass… C’était l’époque où, étudiant à Nancy, je prenais le train, les bras toujours chargés de ma grosse guitare, mon banjo et mon violon.
Puis sont arrivées dès 1983 les premières commandes, petits arrangements, séances de studio, musique de documentaire pour la télévision. Le côté multi-instrumentiste m’avait ouvert des portes et m’apportait la reconnaissance des professionnels de la place. Je suis alors rentré comme guitariste, chanteur, clavier puis violoniste dans un orchestre de variété. Nous écumions les bals de la région chaque samedi. Cela a duré près de 4 ans.
C’est également à cette époque que mon univers musical s’est définitivement ouvert à l’improvisation. C’est le son de Stéphane Grappelli, au beau détour d’une radio, qui m’a fait découvrir et aimer la musique de jazz, musique qui m’était jusqu’alors parfaitement étrangère. son jeu fin et rapide n’était pas sans me rappeler la virtuosité et la limpidité des meilleurs joueurs écossais ou bluegrass, mais il avait quelque chose que les autres n’avaient pas : un espace harmonique totalement nouveau et surtout une facilité et une fluidité de jeu parfaitement diaboliques. Stéphane Grappelli est alors devenu une référence absolue, un deuxième papa. Sa musique m’aura ouvert les portes du jazz et de l’improvisation et aura fait du violon mon instrument de prédilection.
C’est également à cette époque que mon univers musical s’est définitivement ouvert à l’improvisation. C’est le son de Stéphane Grappelli au beau détour d’une radio, qui m’a fait découvrir et aimer le jazz, musique qui m’était restée jusqu’alors parfaitement étrangère.
Son jeu fin et rapide n’était pas sans me rappeler la virtuosité des meilleurs joueurs écossais ou bluegrass, mais il avait quelque chose en plus, cet espace harmonique totalement nouveau et surtout une fluidité et une liberté qui m’explosait à la figure. Stéphane Grappelli est vite devenu ma référence absolue, mon deuxième papa. Cette rencontre m’aura ouvert les portes du jazz et de l’improvisation et aura fait du violon mon instrument de prédilection.
C’est à Nancy, au cours de mes études d’architecture de 1981 à 1987, que je découvre pour la première fois la musique de Madagascar. Des groupes prestigieux tels que Lolo Sy Ny Tariny ou Mahaleo y avaient élu domicile. Je me suis retrouvé au beau milieu de ces gens, pris par ces voix magnifiques et la force poignante de leurs polyphonies. Leur musique était à la fois totalement nouvelle pour moi, très exotique, mais aussi très proche par notre façon commune de la pratiquer. L’écoute en était à la base, et l’expression spontanée. La communauté latino-américaine était aussi souvent de la partie, avec notamment le chanteur afro-américain Carlos Morales avec qui je découvrais peu à peu les plaisirs du duo en jouant dans les restaurants de la ville. L’idée du métissage m’apparut alors comme le terrain possible de toute une vie.
En avril 88, après trois ans d’étude de piano aux côtés de Christian Ambroise, j’intègre en tant que clavier le BIG BAND du CNR de Nancy alors dirigé par Philippe Villa. S’en suit un travail sous la direction de François Jeanneau, puis une tournée en Allemagne pour finir sur la grande scène du festival Nancy Jazz Pulsation. Pour la première fois, en même temps que je découvrais la puissance grisante du big band, je découvrais qu’il y avait deux façons de jouer la musique : l’une en sortant ses plus beaux diplômes, l’autre plus modestement, avec ses oreilles. J’ai alors pris conscience que mon parcours ne m’offrirait plus que la seule carte possible de la modestie, non sans regretter parfois de ne pas avoir reçu cette « base musicale » qui fait encore de vous aux yeux de certains LE véritable musicien. Ma participation pendant trois ans à la mise sur pied du CMCN (centre musical et créatif de Nancy) m’écartera définitivement d’une certaine approche fermée de l’exercice et de l’apprentissage musical, bien trop éloigné à mon goût des réalités sensibles et plurielles qui m’ont fait aimer la musique.
C’est pourtant dans cette école que naîtra mon amitié avec le percussionniste marocain Latif Chaarani, aux côtés duquel je me passionnerai pour la chose rythmique, à travers la découverte de formes traditionnelles d’une part (cubaine, afro-cubaine, orientale…), mais surtout comme élément structurant fondamental de l’expression musicale et plus particulièrement de l’improvisation. Latif sera à l’origine de mon entrée dans le groupe Tierra Brava (musiques cubaines et afro-cubaine) dirigé depuis 1974 par le chanteur et percussionniste Haïtien Claude Gilbert. Ce groupe est devenu en presque 30 ans un véritable vivier, passage incontournable des musiciens actifs de la grande région Nord-Est.
Mon arrivée en Guadeloupe en février 1991 représente à la fois un véritable virage dans ma vie (l’éloignement de ma famille, de mes amis, la naissance de mes enfants), mais aussi l’idée plus vaste d’un voyage dans la continuité. Le métissage devient alors une réalité de tous les jours, au gré des rencontres, des musiciens ou des musiques. Il en va de même dans le domaine de l’architecture où j’exerce en parallèle depuis 1993.
La musique que je découvre alors est à l’image de celle qui m’a toujours bercé : multiple, spontanée et vivante, généralement orale, souvent improvisée. La fusion se fera donc assez naturellement avec cette forme musicale à la fois complexe et typée, mais toujours encline à une ouverture à l’autre, au métissage renouvelé ; une sorte de langage universel.
Le travail avec Christian Laviso et Mano Falla dans le groupe Horizon, tout comme celui aux côtés d’Edouard Benoît dès fin 1991 dans son groupe Tropic’Fusion, me donneront les premières clés de tout un univers créole qui, loin s’en faut, ne m’a pas encore livré aujourd’hui tous ses secrets. L’expérience récente au sein de la compagnie Trilogie Lena Blou pour le spectacle Grenn Sel m’aura permis d’explorer un peu plus en profondeur les richesses d’une culture Ka en pleine renaissance, cherchant sa voie entre la respect de la tradition et la modernité la plus créatrice. Le métissage apparaît là encore comme une forme possible de créativité, vecteur de juxtapositions et de rencontres originales.
Devenu adepte des formules légères en duo ou en trio, je perçois mon travail comme celui d’un équilibriste toujours à l’affût des mouvements de ses partenaires, rêvant à la fois au son du grand Grappelli et aux phrases enflammées d’un Paquito D’Rivera. Et si je reste profondément marqué par mes rencontres avec Stéphane Grappelli, Andy Narell, Solon Gonçalves, Mayra Andrade ou Florin Niculescu, la musique m’apparaît plus encore aujourd’hui comme la plus belle des aventures à faire et à perpétuer, une simple affaire d’humilité, de plaisir et d’amitié.”
Autres informations
Bruno Jofa a joué avec :
Musiciens : Latif Chaarani – Jean-Marie Viguier – Jaime Cordoba – Alfred Memel – Edouard Benoît – Mano Falla –Christian Laviso – Fabrice Devienne – Gérard Ponthieux – Christian Fanfant – Andy Narell – Christian Amour – François Jeanneau – Michel Alibo – Guem – Raymond D’Huy – Fred Desplan – Claude Décator – Patrice Coyo – Normand Deveault – Jocelyn Menard – Dadita Rabeson – Olivier Andrianamanpiamina – Panayotis Dourantonis – Silo Andrianandraina – Dousty Dos Santos – Christian Laviso – Alex Jabot – Alfred Memel – Didier Juste – Charlie Chomereau-Lamotte – Eric Danquin – Philippe Dambury – Toto Jean-Marie – Marc Jalet – Daniel Kissoun – Jean-Louis Mérault …
Groupes : Tierra Brava (musiques afro-cubaines) – Big Band du CNR de Lorraine (Jazz) – Horizon (Gwo Ka Moden) – Corda Quartet (jazz ka) – Tropic’Fusion (biguine jazz fusion) – Jazz Artkestra (dir. C. Décator) – Mounajaz (dir. C. Amour) – Sonis Arkestra (dir : F. Jeanneau)) – La Compagnie Trilogie Lena Blou (dance Ka contemporaine)
Il a également accompagné :
Carlos Morales (équateur) – Hanitra Ranaivo (Madagascar) – Pierre Durastel (Fr) – Joseph Gianetti (Italie) – Jean Pierre Cari (Gpe) – Joby Bernabé (Martinique) – Vania Nazaré (Brésil) – Jean Louis Céleste (Gpe) – Pipo Gertrude (Martinique) – Ralph Thamar (Martinique) – Josette Martial (Gpe) – Rony Théophile (Gpe) – Liza Michael (Fr)
Et s’est produit, entre autre, à :
- Festival “Nancy Jazz Pulsation” – oct. 1989 & 2003
- Festival “Jazz à la Martinique” – déc. 91
- Festival de Jazz de Pointe-à-Pitre – déc. 91
- Festival FESTAG (Gpe) – 1991 et 1993
- Festival “Musiques Actuelles” (Gpe) – mars 1993
- Emission Partition du goupe KWAK – RFO Gpe 1993
- 1er festival de jazz de St Martin – mai 1994
- Festival “Hot Land” à Moustey France – juin 1994
- Jazz A Kaz – La Une Guadeloupe – été 2000
- tournée Lena Blou (Venezuela, Haïti, Canada, USA, Mexique) mai juin 2005
- Festival “Biguine Jazz” Fonds St Jacques – Martinique juillet 2005
- En Allemagne, en Syrie, à Montréal, à Madagascar