Dee Dee Bridgewater’s Malian Project
La tendance est aux projets, aux concepts, et parfois on en viendrait à se méfier de ce qui ressemble dans quelques cas à du pur marketing plutôt qu’à une vraie profession de foi. Car ici pour Dee Dee Bridgewater, c’est bien de cette dernière notion qu’il s’agit. Le retour à l’Afrique de Dee Dee s’est d’abord traduit par des voyages au Mali et une immersion dans la tradition et la musique du continent, avant de nous être rapporté sous la forme de cette fusion présentée ici, avec, autour de la chanteuse, un trio jazz « classique » – au rang duquel le formidable et fidèle contrebassiste Ira Coleman, et une formation de chanteurs et musiciens maliens absolument époustouflante. Citons quelques valeurs sûres, et tout d’abord Cheick Tidiane Seck, meneur d’hommes à l’énergie impressionnante – aux claviers comme aux percussions, et vieux routard de la fusion entre jazz et musique mandingue – et vous pouvez aller régulièrement vous en convaincre aux jam sessions du Baiser Salé, à consommer sans modération -, ainsi également que Baba Sissoko aux talking drums. Ce sont cependant peut-être les deux chanteurs qui m’ont le plus marqué : Kabiné Kouyaté, à la stature imposante et doué d’une voix extraordinaire, et Mamani Keita, chanteuse déjà largement reconnue dans le monde de la musique africaine, en particulier à travers les albums Electro Bamako, et qui vole parfois la vedette à Dee Dee par sa présence, son énergie… et sa voix bien sûr. Visiblement, Dee Dee est heureuse de partager cette fusion musicale sur scène, les duos, les combinaisons avec les percussionnistes, agrémentées de danses traditionnelles, s’enchainent. Dee Dee continue à chanter très jazz, mais vire parfois au soul-rock quand elle accompagne la transe musicale des tambours mandingues. Au total un spectacle riche et sans baisse de tension, même quand Dee Dee doit meubler sur scène entre deux ré-accordements de la kora… mais c’est presque naturel pour une professionnelle de cette envergure.