L’immense Ray Lema poursuit inlassablement sa route, et de plus en plus, la mène là où il l’entend, vers un jazz nourri de son histoire et de ses traditions, clairement revendiqué inclassable. C’est là tout son sel ! L’histoire entre Ray Lema et le jazz est sous-jacente à sa musique depuis longtemps. Le premier rapprochement eut lieu avec Joachim Kühn – excusez du peu – en 1992, avec Euro-African Suite. Plus tard Ray Lema enregistrera avec Daniel Goyone, François Du Bois, avant de monter son propre quintet (Etienne Mbappé, Irving Acao, Nicolas Viccaro & Sylvain Gontard) au tournant des années 2010. Plus récemment, c’est son duo avec Laurent de Wilde qui a largement été reconnu par la presse jazz et leur a ouvert les portes de nombreuses scènes en France. Ray Lema a été révélé au public au départ avec sa rumba / funk / jazz / parfois un peu électro et surtout à nulle autre pareille et l’album Kinshasa Washington D.C. Paris en 1983, suivi plus tard par Medecine (1986), Nangadeef (1989) etc. Et sa musique aujourd’hui, puise dans ces deux grands courants.
L’album Transcendance sorti l’an dernier, n’y fait pas exception. Par rapport au quintet, Michel Alibo y remplace Etienne Mbappé, et Ray Lema a également convié le guitariste brésilien Rodrigo Viana et les flûtistes Freddy Massamba et Jocelyn Menniel. « Transcendance comme transe, car dans toutes les musiques noires la transe est un élément toujours sous-jacent, transcendance comme danse car le rythme et le groove sont à la base de toute ma musique et enfin, transcendance comme dépassement, dépassement des clivages, dépassement de ses propres limites, de ses peurs et de sa zone de confort. » explique Ray. Et le ton est donné dès les premiers beats afro du morceau titre, Transcendance. Irrésistible. Entre jazz funk afro-beat et Caraïbes, Zoukissa prolonge les couleurs chaudes sous le drive puissant de Nicolas Viccaro. Michel Alibo met le feu à sa basse, tandis qu’aux cuivres Irving Acao et Sylvain Gontard s’envolent avec passion. Tout ce monde se connait par cœur et cela se sent, dans la cohésion, les échanges, la complicité et la finesse (Congo Rhapsody) qui transparaissent ici. En hommage à cette région meurtrie du Congo, Kivu’s Blues, nostalgique et puissant à la fois, se perd dans les méandres de la guitare rock de Rodrigo Viana. Le rock est d’ailleurs complètement assumé un peu plus loin, avec Sin, avant de replonger dans la rumba du 3ème Bureau. Enfin, sur tous ses albums, Ray Lema convoque les esprits de la mère forêt et nous le rappelle ici avec les flûtes pygmées de Chimères, en clôture de cette Transcendance, invitation à un voyage sans barrières et profondément humain.
Transcendance (Ray Lema)
Année : 2018
Label / référence : One Drop (1DROP07)
Personnel : Ray Lema, Sylvain Gontard, Irving Acao, Michel Alibo, Rodrigo Viana, Nicolas Viccaro + Freddy Massamba, Jocelyn Menniel
Plus loin :
- Le site web de Ray Lema : http://raylema.com
Quelques références discographiques :